Jörn De Leeuw: "c'est très simple: une maison sera beaucoup mieux mise en valeur avec un jardin joliment aménagé"
Qu'est-ce qui, aujourd'hui, vous plaît le plus dans votre travail?
"Vous savez ce que j'ai remarqué ces dernières années? Nombre de clients me laissent faire. Il est difficile de dire si c'est dû au fait que mon entreprise a acquis une plus grande notoriété et une meilleure image ou si c'est dû à certaines réalisations qui ont attiré l'attention. Mais ce qui me frappe, c'est qu'à l'exception de quelques souhaits de base, les clients continuent à m'octroyer de la liberté et à me demander de faire comme je veux. Dans 95% des cas, les plans que j'élabore sont également exécutés tels que je les ai dessinés. J'en suis heureux et j'espère que cela continuera."
Je suppose que cela n'a pas toujours été le cas. Qu'est-ce qui a changé depuis vos débuts?
"Non, certainement pas. Au début, vous êtes déjà heureux d'avoir du travail et vous acceptez n'importe quelle demande. Au bout d'un certain temps, vous développez votre propre style. À l'école, nous avons appris à travailler principalement avec des lignes droites, ce que vous appliquez au début. Mais dans la nature, rien n'est droit et, petit à petit, je me suis orienté vers des formes organiques. Cela convient tant pour les maisons rurales que pour les maisons plus modernes. C'est devenu mon style préféré et, au cours des huit ou neuf dernières années, je n'ai accepté que des commandes en ce sens. En outre, j'ai eu la chance de rencontrer les bonnes personnes au bon moment. De grands projets ont donné un sérieux coup de pouce à ma carrière. Cela devient ensuite un cercle vicieux, car ce sont ces projets qui sont photographiés et publiés et qui font que les gens viennent vous voir. Et reviennent. Et lorsque cela colle au niveau personnel, vous savez pratiquement à l'avance que cela ne pourra pas mal tourner. Le budget constitue parfois un sujet de discussion, mais je n'ai pas à m'en plaindre quand je pense aux budgets avec lesquels j'ai jadis dû travailler. J'ai la chance d'attirer aujourd'hui des clients qui apprécient l'importance d'un jardin bien conçu, qui savent que ce jardin adresse un signal au monde extérieur et qui sont dès lors prêts à investir dans celui-ci."
Le Corona a aussi renforcé l'importance du jardin. Pourquoi réalisons-nous seulement maintenant que la maison et le jardin sont aussi importants l'un que l'autre?
"C'est très simple: une maison sera beaucoup mieux mise en valeur avec un jardin joliment aménagé. Lorsqu'une maison est joliment décorée, rentrer chez soi devient un plaisir. Aussi étrange que cela puisse paraître, le Corona a été une bénédiction pour notre secteur. Les gens ont soudain réalisé qu'un jardin joliment aménagé apporte une grande valeur ajoutée en termes de confort de vie. J'ai eu difficile à suivre en raison du nombre élevé des demandes. Le réchauffement climatique a également eu un impact sur la manière dont nous concevons notre environnement. Dans une moindre mesure pour moi, car j'ai toujours travaillé avec des plantes plus résistantes à la sécheresse. Il est toutefois frappant de constater que les systèmes d'arrosage se sont multipliés ces dernières années. J'en propose toujours dans des projets globaux. Mais si, avant, le client ne les acceptait que sporadiquement, c'est aujourd'hui presque toujours le cas. Les étés secs et chauds ont favorisé cette prise de conscience."
Il y a aussi, d'autre part, le phénomène des fortes pluies. Comment procédez-vous afin que vos jardins puissent absorber celles-ci?
"Collecter l'eau est aujourd'hui imposé par la loi dans le cadre de l'ordonnance sur les eaux pluviales. Vous devez stocker votre eau sur place et, très souvent, cela se fait sous terre avec des caissons d'infiltration. Les nouveaux projets de construction doivent aussi obligatoirement être dotés d'un oued. Nous essayons d'intégrer joliment ceux-ci dans l'ensemble, de manière à ce qu'ils soient à peine visibles. Récemment, nous avons aussi réalisé un projet où, en concertation avec le client, nous avons opté pour une solution très naturelle et aménagé une mare de pas moins de 270 m² dans le grand jardin paysager d'une maison moderne. Cela ressemble presque à un paysage naturel, mais c'est nous qui l'avons créé. C'est quelque chose que nous faisons souvent: nous commençons à concevoir et aménager de façon très sobre près de la maison, mais plus on s'en éloigne, plus cela devient naturel. Pour ce faire, nous recourons souvent à des bordures boisées, des plantes indigènes et un fauchage extensif pour assurer la transition avec le paysage environnant. Enfin, nous essayons de réduire les revêtements en dur au strict minimum. Et nous allons même jusqu'à décorer la terrasse de verdure, ce qui crée une ambiance chaleureuse."
Vous avez une passion marquée pour les fleurs à bulbe. Pourquoi précisément?
"J'aime les fleurs à bulbe pour couvrir les périodes creuses entre les premières fleurs et les fleurs d'été. Dans le parc Keukenhof aux Pays-Bas sont plantées chaque années des millions de fleurs à bulbe. C'est un véritable spectacle et j'ai tellement aimé cela que j'ai essayé d'en faire une version miniature dans mon propre jardin. Les bulbes forment aussi une source de nourriture importante pour les insectes. Mon beau-père étant apiculteur, je sais à quel point les abeilles ont la vie dure. Dans notre jardin, elles sont assurées de trouver de la nourriture en abondance. Je les recommande également à mes clients. Notre travail consiste à aider la nature. C'est pourquoi je préfère dessiner des bordures boisées avec des arbustes indigènes plutôt qu'une haie droite classique. Pour l'intimité, cela ne fait aucune différence."
Dans les parterres, vous associez les fleurs à bulbe avec des plantes vivaces, une autre de vos passions. Comment avez-vous acquis vos connaissances dans ce domaine?
"Sur le tas et en expérimentant. Je lis différentes revues spécialisées et suis de près plusieurs producteurs de plantes vivaces et concepteurs de plantes. C'est ainsi qu'on élargit systématiquement ses connaissances. J'ai évidemment des préférences, mais j'essaie toujours d'intégrer un éventail diversifié. Je propose aux personnes qui souhaitent travailler dans leur jardin de nombreuses variétés et davantage de ressenti. Pour celles qui veulent réduire l'entretien au minimum, par contre, nous limitons évidemment le nombre de variétés proposées."
L'éclairage constitue un autre aspect. Quel regard portez-vous sur celui-ci?
"Pour moi, il doit être subtil et pas excessif. Vous devez le voir lorsque vous l'allumez, mais en journée, vous ne voulez pas voir des poteaux gênants. Et je préfère travailler avec des lumières chaudes et des minuteries. Je trouve également que l'éclairage apporte une valeur ajoutée à l'architecture actuelle des maisons, qui comportent souvent de grandes baies vitrées en façade. Sans éclairage, vous vous retrouvez avec une surface noire et morte, ce que l'on veut éviter. Pour l'éclairage, je collabore avec un partenaire à qui j'envoie les plans afin que le concept soit totalement fini jusque dans les moindres détails."
Quel conseil donneriez-vous à ceux qui débutent dans le métier?
"Les clients me disent souvent qu'ils apprécient que je défende mon opinion. Quand je ne suis pas convaincu par telle ou telle idée, je le dis. Mais de façon amicale et avec suffisamment d'arguments. Les gens font appel à nous parce que nous détenons des connaissances qu'ils n'ont pas. Il est donc important de défendre son projet. Certains appelleront cela de la fierté ou de l'authenticité, mais les gens apprécient vraiment cela."
Vous avez toujours été purement un concepteur. Un choix délibéré?
"Oui, absolument. Enfant, j'ai mis les mains dans la terre, plus précisément dans le potager de mon voisin qui était entrepreneur de jardins. C'est ainsi qu'est née ma fascination pour le jardin, mais au cours de mes études, j'ai rapidement évolué vers la conception. Après avoir obtenu mon diplôme supérieur en architecture de jardins, je me suis immédiatement mis à mon compte. L'aménagement et l'entretien ne sont pas pour moi, je suis plutôt travail mental que physique. J'aime bien travailler parfois dans mon propre jardin, mais je ne pourrais pas le faire tous les jours. Respect à ceux qui le font. Je m'épanouis lorsque je dessine, que je vois des clients et que j'assure le suivi des chantiers. Il y a 17 ans, j'étais une denrée assez rare dans ce domaine, mais ces dernières années, je constate que de plus en plus de gens se concentrent uniquement sur la conception. Il y a assurément davantage de concurrence dans ce domaine aujourd'hui."
On entend sans cesse parler de croissance. Vous employez vous-même deux personnes. Comment envisagez-vous votre avenir?
"Grandir pour grandir, ce n'est pas pour moi. J'emploie une personne qui est là depuis dix ans et qui se charge principalement des métrés et des esquisses en images. Depuis un an et demi, je peux compter sur une seconde personne qui, en tant que dessinateur technique, réalise mes croquis à la main. Nous formons une bonne équipe. Je trouve particulièrement important de continuer à m'occuper moi-même de toute la conception, de telle sorte que je ne vois pas de nécessité d'élargir mon personnel. Je dois cependant apprendre à mieux déléguer. J'espère également continuer à travailler principalement dans le segment des projets dans lequel nous sommes actifs actuellement. Et avec des clients qui partagent le récit que Verdé veut écrire. Les gens sont plus exigeants qu'avant et ce n'est pas un problème, tant qu'il y a un respect mutuel et qu'ils sont prêts à payer le juste prix. Mais pour l'instant, je n'ai pas à me plaindre. Pour mes clients, pouvoir profiter du jardin joue un rôle essentiel et c'est exactement ce à quoi j'aspire avec mes créations. Chaque jardin livré me procure encore et toujours beaucoup de satisfaction. Et le fait que certains clients soient devenus des amis ou vous invitent à prendre un verre par la suite montre que c'est également réciproque."
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